06/09/2011
Méthodologie : le résumé ou contraction de texte (Document mis en ligne sur ce blog avec l’autorisation de son auteur, Gilles Negrello, professeur en hypokhâgne et en math spé au Lycée Champollion de Grenoble. Merci de ne pas le diffuser)
Méthodologie : le résumé ou contraction de texte
(Document mis en ligne sur ce blog avec l’autorisation de son auteur, Gilles Negrello, professeur en hypokhâgne et en math spé au Lycée Champollion de Grenoble. Merci de ne pas le diffuser)
Première partie : présentation du résumé
1. Définition
Le résumé consiste à réécrire un texte plus brièvement, en respectant un nombre imposé de mots, tout en retenant les informations essentielles.
2. Intérêt de l’exercice
* Du point de vue des compétences :
Le résumé répond à des besoins pratiques : lors des études et dans la vie professionnelle, toute recherche documentaire passe par un travail de résumé, nécessaire pour conserver une trace écrite (fiches) des documents consultés.
* Du point de vue de l’apprentissage :
Le résumé est un exercice formateur. Il apprend à analyser un texte pour le comprendre puis le reformuler. Cela développe les capacités de lecture et de rédaction, en obligeant à respecter une exigence de rigueur.
* Du point de vue de l’évaluation :
Le résumé constitue un test
- de culture générale : il est impossible de résumer correctement un texte si l’on est pas un peu au courant du thème traité dans ce texte ;
- d’intelligence : le résumé exige une bonne compréhension du texte (pour éviter les contresens), de la logique et de l’objectivité (pour respecter la pensée d’autrui sans l’interpréter) ;
- d’expression : une syntaxe claire et rigoureuse, un vocabulaire riche et précis (en particulier le vocabulaire abstrait) sont nécessaires pour reformuler des idées en les condensant.
3. Règles du résumé
* Suivre l’ordre du texte d’origine
Il faut respecter le mouvement du raisonnement, la succession des idées. Attention : cela ne signifie pas qu’il faille réduire tous les paragraphes dans les mêmes proportions ; certains paragraphes peuvent être sans grand intérêt. C’est la suite des idées principales qui doit être rendue.
* Conserver le même système d’énonciation
Le résumé utilise les mêmes pronoms et les mêmes temps verbaux que le texte d’origine. Par exemple, si le texte d’origine utilise la première personne du singulier (je) et le présent de l’indicatif, le résumé fera de même. Il ne faut pas prendre de distance par rapport au texte ; sont donc exclues les formules du type : « Selon l’auteur… » ou « L’auteur dit que… ».
*Reformuler le texte
Il faut absolument éviter de faire un assemblage de citations. Le rédacteur du résumé doit utiliser son propre vocabulaire. Cependant, pour les mots-clés, il est inutile de chercher des équivalents approximatifs qui conduiraient à gauchir le texte.
* Respecter le nombre de mots imparti
Il faut faire figurer à la fin du résumé le nombre exact de mots utilisés (ce total sera vérifié et toute erreur sévèrement sanctionnée).
On dispose d’une marge de plus ou moins 10 %. Par exemple, pour un résumé demandé en 220 mots, +/- 10 %, on peut utiliser entre 198 et 242 mots.
Pour faciliter le recomptage, on place une barre tous les 10 mots.
Comment compter les mots ?
La règle de base pour le résumé repose sur une définition visuelle : un mot est une unité typographique isolée par deux blancs. Exemple : Jean de La Fontaine = 4 mots ; Charles de Gaulle = 3 mots. Tous les « petits mots » (articles, conjonctions, pronoms) comptent pour un mot.
Cas particuliers :
Les dates comptent pour un mot (ex : 1789 = 1 mot).
Les pourcentages comptent pour un mot (ex : 50 % = 2 mots).
Les sigles comptent pour un mot (ex : SNCF = 1 mot)
Les mots composés : on considère que le tiret sépare deux mots au même titre qu’un espace. Exemples : c’est-à-dire = 4 mots, après-midi = 2 mots, chou-fleur = 2 mots.
Mais aujourd’hui = 1 mot ; socio-économique = 1 mot, puisque les deux unités typographiques n’ont pas de sens à elles seules.
a-t-il = 2 mots (car t n’a pas une signification propre).
* Mentionner les références du texte
À la fin du résumé, indiquer l’auteur et la source (journal, revue, ouvrage…) du texte. Ces indications n’entrent pas dans le décompte des mots.
4. Préparation de l’exercice
Il faut allier une préparation générale, consistant en lectures diversifiées (en particulier de la presse) et en prise de notes sur des livres, et une préparation pratique consistant tout simplement à s’entraîner au résumé.
Deuxième partie : Méthode
Schéma de la méthode
I. Phase d’analyse
A. Première lecture
B. Explication préalable du texte
1. Au niveau du paragraphe
2. Au niveau de l’ensemble du texte
II. Phase de synthèse
C. Établissement du plan du texte et de celui du résumé
D. Rédaction du résumé
E. Présentation, écriture, révision
Présentation détaillée des différentes étapes :
Cette première phase du travail peut être réalisée directement sur la photocopie, en portant des annotations sur le texte et dans ses marges : soulignement à l’aide de différentes couleurs, phrases en style télégraphique, symboles de relations logiques.
A. La première lecture
1. Observation des références du texte
Avant de commencer à lire le texte, il faut examiner les références qui l’accompagnent : nom de l’auteur, titre du livre d’où il est extrait, date de publication. Même si l’on ignore qui est l’auteur, ces indications donnent une première idée sur la nature et le sujet du texte, éventuellement sur son orientation idéologique.
2. Première lecture
Il faut ensuite déterminer rapidement le domaine de connaissance dont relève le texte (histoire, sociologie, philosophie, critique littéraire…), être attentif aux noms propres, aux titres d’œuvres et aux dates citées dans le texte.
3. Bilan de cette 1ère approche
Après la première lecture, pour faire un premier bilan, on peut noter rapidement :
- le thème du texte,
- la thèse défendue par l’auteur.
B. L’explication préalable du texte
1. Au niveau du paragraphe
Commencer par numéroter les paragraphes.
La véritable unité de pensée d’un texte est le paragraphe, non la phrase. Un paragraphe bien structuré est construit comme une dissertation en raccourci : énoncé du sujet / argument / exemple / formule conclusive. Même lorsque la structure est plus souple, chaque paragraphe contient en principe une idée centrale et la division en paragraphes correspond au plan du texte.
Travail à l’intérieur de chaque paragraphe :
a) Souligner les mots-clés, les expressions-clés, voire les phrases clés (les passages soulignés doivent être courts).
Pour les repérer, deux indications :
- ils sont souvent en position grammaticale de régime (complément d’objet ou attribut du sujet) ;
- ils sont souvent organisés en séries complémentaires ou en paires opposées.
b) Encadrer les articulations logiques et rétablir celles qui sont seulement suggérées (en effet, donc, c’est pourquoi, en revanche, d’abord, ensuite, enfin…)
c) Retrouver l’unité du paragraphe et l’énoncer sous forme d’une proposition (« phrase-étiquette »). À ce stade, on peut utiliser des symboles (= ≠ // →).
2. Au niveau de l’ensemble du texte
Repérer les paragraphes d’introduction, de conclusion, de transition.
Rassembler les paragraphes qui se rattachent à la même idée, par exemple, associer un paragraphe d’exemples à l’idée que ces exemples illustrent.
Lors de ce rapprochement entre les paragraphes, il faut être attentif :
- aux répétitions (relier par un trait les passages qui concernent le même sujet) ;
- aux digressions (se demander si un passage qui s’éloigne du thème principal est important ou non) ;
- aux exemples. A ce propos, notez qu’il importe de distinguer ceux qui n’ont qu’un rôle d’illustration de ceux qui font progresser le raisonnement. On conserve les seconds, on supprime les premiers, qui ont seuls véritablement le statut d’exemple, que l’on peut en principe définir ainsi : un exemple est illustratif (il offre une illustration d’un raisonnement général), partiel (ce n’est qu’une illustration), substituable (une autre illustration aurait aussi bien fait l’affaire), arbitraire (on a choisi cette illustration, on aurait pu en choisir une autre). Il ne faut donc pas confondre l’exemple avec le « cas » qu’un texte s’applique à traiter parce que c’est la substance de ce cas qui intéresse l’auteur.
II. Synthèse
Cette deuxième phase du travail se fait en écrivant au brouillon. Numérotez les feuilles que vous utilisez et n’écrivez qu’au recto, pour avoir tout sous les yeux.
C. Établissement du plan du texte et de celui du résumé
L’important, pour établir le plan d’un texte, n’est pas de le diviser en sections successives, mais de faire apparaître les hiérarchies et les enchaînements d’idées.
Dans un premier temps, il faut établir un plan très détaillé (parties, sous-parties, sous-sous-parties…). On marque la hiérarchie de ces sous-ensembles par des chiffres et des lettres[1] :
I.
A.
1°)
a)
Ce n’est qu’ensuite qu’on regarde ce qui devra être éliminé pour le résumé.
Il est obligatoire de conserver globalement le plan du texte dans le résumé, même si quelques changements de détail sont possibles pour clarifier et simplifier sa structure.
D. Rédaction du résumé
On fait une première rédaction au brouillon avant de recopier au propre. Au brouillon, il faut toujours prévoir de grandes marges et des interlignes aérés pour faire des corrections et des réajustements.
Pour le comptage des mots, une méthode simple : numéroter les lignes et écrire 10 mots par lignes.
Lors du premier jet, il vaut mieux faire trop long que trop court, car il est plus facile d’éliminer certains éléments que d’en rechercher après coup pour grossir l’ensemble.
Lors de la rédaction, il faut veiller à :
- trouver des formules personnelles en cherchant des synonymes ;
- mettre en valeur la progression du raisonnement en insistant sur les articulations logiques ;
- respecter l’équilibre du texte en accordant à chaque partie du raisonnement la place qui lui convient, sans en développer une au détriment des autres.
E. Présentation, écriture, révision
L’apparence visuelle du travail est déterminante : soignez la calligraphie ; ne collez pas les mots les uns aux autres, et inversement ne laissez pas d’espaces entre les lettres qui composent un mot, dans la mesure du possible, évitez les ratures ; si vous effectuez a posteriori une correction (qu’il s’agisse d’une faute ou d’un oubli), faites-le proprement, clairement, sans compromettre la lisibilité de votre copie. Après avoir écrit le résumé au propre, le relire pour vérifier l’orthographe et la ponctuation.
Gilles Negrello
QUELQUES AJOUTS EN VRAC
- Un truc idiot (mais pas inutile) : la posture de l’étudiant qui élabore un résumé est celle du chef de cabinet à qui son ministre demande de réduire une étude de 200 pages à 20, parce qu’il est pressé mais qu’il doit prendre une décision au regard du contenu de l’étude en question. Faut-il accorder 1 million d’euros de subvention à tel projet dont le promoteur prétend qu’il en rapporterait 5 ? Le chef de cabinet doit donc réduire le texte sans le déformer, sachant que le ministre ne veut pas être obligé de se reporter à l’original pour éclaircir tel ou tel point. (NB : si le projet est adopté et ne rapporte rien, le chef de cabinet sera viré, naturellement).
- Le résumé doit être « organique » : il doit ressembler à un texte, pas à la juxtaposition d’énoncés. Traduisons : le résumé obéit à la règle habituelle de composition des paragraphes, lesquels constituent des unités logiques et ont donc une certaine longueur. Lorsque le correcteur voit un résumé composé d’une suite de « paragraphes » d’une ligne, il sait que le gentil candidat n’a pas réussi à élaborer quelque chose de cohérent, ce qui signifie bien souvent qu’il n’a pas compris la cohérence du texte.
- Le résumé doit « sonner français » : un lecteur « innocent » (pas un correcteur donc) qui le lirait devrait y retrouver intuitivement une sorte de norme du français écrit, au lieu de se trouver face à quelque chose qui semble traduit du serbo-croate par un Japonais qui aurait appris le français avec un militant du créole réunionnais. Bien sûr, cette exigence est relative : la règle du jeu du résumé conduit parfois à adopter des formulations qui ne viendraient pas spontanément sous la plume du locuteur « moyen ».
- Plus largement, vous devez avoir en tête une exigence déjà mentionnée un peu plus haut : le résumé doit être « lisible ». Ceci nous conduit à évoquer la question de la parenthèse. Celle-ci (qui est bien commode : elle permet souvent d’économiser des mots) n’est pas interdite : vous devez seulement la manier avec doigté et en user avec parcimonie, de manière à ce que, précisément, elle n’entrave pas la lisibilité de votre résumé.
- Pour réussir un résumé, il faut bien maîtriser le vocabulaire, puisqu’il s’agit à la fois de comprendre le texte puis de le réécrire sans reprendre ses formulations (sauf pour les termes techniques ou irremplaçables) et en le réduisant. Que faire lorsque vous vous heurtez à un mot inconnu ? Vous pouvez tenter deux manœuvres : la première consiste à tenter de démêler le sens du mot à partir du propos et du contexte (c’est risqué, mais c’est mieux que rien) ; la seconde consiste à tenter de ramener l’inconnu au connu : si vous ne connaissez pas le mot « chatouillis », vous connaissez peut-être « chatouiller », et tous les espoirs vous sont permis – en revanche, si vous ne connaissez pas « turpitude », c’est mal parti (sauf si vous avez fait du latin …).
- Le résumé relève du bricolage. Par exemple, on vous demande de ramener au 1Oe des textes qui n’ont jamais la même densité, et dont la densité interne n’est pas constante.
- L’une des angoisses des gentils candidats est de se rendre compte à la fin de la rédaction qu’ils s’y sont mal pris, ont conservé trop de choses, et donc ont fait trop long. Une astuce pour éviter cela : avant de rédiger, divisez la matière que vous avez conservée en trois blocs de « taille » égale. Commencez la rédaction, et une fois arrivés à la fin du premier bloc, vérifiez que vous n’avez pas consommé plus du tiers des mots auxquels vous avez droit ; idem à la fin du second bloc. Et quand c’est trop long ? Lorsque l’excès n’est pas trop important, on peut jouer sur les formulations (tenter de dire la même chose en utilisant moins de mots); si le problème est plus grave, et que donc on a conservé trop de choses, il faut « dégraisser » bien sûr, mais en veillant à ménager ou à reconstituer la cohérence du propos.
Guy Barthèlemy
[1] Ce travail de repérage et de hiérarchisation n’est pas toujours possible : certains textes, mal élaborés, peuvent rendre cette opération très difficile.
10:12 Publié dans Méthodologie, conseils, techniques de rédaction | Lien permanent | Commentaires (0)
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