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03/09/2017

Oral des petites mines (lecture d'image)

Oral français- Petites mines

 

 Vérifier la durée totale de l ‘épreuve.

 

Pourquoi cette épreuve ? Elle vient compléter la batterie de celles que le candidat a déjà affrontées, dont elle est totalement différente. Ce qui intéresse le jury, c’est de voir comment ce candidat  va s’y prendre, s’il manifeste l’agilité intellectuelle, la culture, le sang-froid, qui permettent d’improviser un commentaire cohérent et judicieux.

Un étudiant de math spé n’est pas un khâgneux : on n’attend pas de vous des connaissances très pointues en histoire de l’art ou en histoire tout court, et on sait que vous n’êtes pas formé à cet exercice de la « lecture d’images ». Ce que le jury attend, c’est que vous soyez capables de mobiliser votre culture (de la plus scolaire à la plus personnelle) pour « faire parler » une image. La culture « scolaire », cela signifie que si le document est une photographie prise en Sibérie en 1992, avec des bâtiments déglingués dans une bourgade sinistre, vous devez rappeler qu’en 1989 a eu lieu la chute du Mur de Berlin et en 1991 la fin de l’URSS, qui a inauguré une période très difficile. Culture au sens le plus large du terme, cela signifie que si vous commentez un tableau représentant la nativité du Christ, vous devez être en mesure de rappeler,  disons, de qui et de quoi il s’agit. Culture personnelle, cela signifie que si vous avez en tête une autre représentation de la nativité, c’est très bien.

Le jury n’a en général pas d’a priori sur l’image qui vous est proposée : il l’a choisie parce que d’une manière ou d’une autre elle lui semblait suggestive, prêter à commentaire, mais il n’a pas en tête une sorte de corrigé dont il attendrait que le candidat se rapproche le plus possible, il ne considère pas que tel commentaire est « vrai »,  et que tous les autres sont « faux ».

Commencez toujours par décrire l’image : vous-même, en procédant à cette opération, vous découvrirez des choses dont vous pourrez ensuite tirer parti, et puis vous pourrez montrer que vous avez conscience d’avoir affaire à quelque chose de visuel, que vous percevez en termes de proportions, de lumière, de couleurs, de  composition, d’étagement des plans.  

Le problème essentiel auquel vous êtes confrontés est de trouver le bon angle d’attaque : on ne commente pas de la même façon une image publicitaire et une œuvre d’art, une photographie choquante et une allégorie.

Si l’image comporte une légende dont les éléments sont exploitables, tirez-en parti, mais ne répétez pas bêtement / platement cette légende : intégrez les informations qu’elle fournit dans votre description ou dans votre commentaire. Soyez attentifs à toutes les informations d’ordre chronologique.

Vous devez éviter de livrer une succession de remarques discontinues, qui en définitive ne constituent pas un commentaire, et vous efforcer au contraire de construire progressivement un commentaire à peu près cohérent, unifié, même s’il comporte des changements de plan ou de perspective justifiés par la nécessité de traiter successivement différents aspects / enjeux de l’image et que vous n’avez pas la possibilité d’atténuer ces ruptures par des transitions bien huilées ( le jury est réaliste, il sait que l’improvisation ne vous permet pas de livrer un travail tiré au cordeau).

Vous allez donc improviser, ce qui est un art difficile : vous allez formuler des analyses oralement en même temps que vous les élaborerez. Un conseil tout simple : ne parlez pas trop vite, pour vous ménager une petite marge de manœuvre. Parlez posément, et en essayant de maintenir un débit égal. Un trou d’air de 3 secondes ne pose pas de problème, une pause de 20 secondes sera mal perçue. Efforcez-vous d’atteindre l’état de concentration qu’implique un tel exercice.

Si vous êtes  vraiment « en panne »  (si vous ne trouvez rien à dire), il ne faut ni dire n’importe quoi, ni rester le nez penché vers le document d’un air buté. Dites posément que vous ne voyez pas comment aborder le document. Le jury vous tendra alors une perche ; vous démarrerez donc l’épreuve dans une situation de faiblesse (puisque vous n’aurez pas été en mesure de satisfaire à l’exigence de départ de cette épreuve), mais vous aurez une chance de vous rattraper : si vous êtes capable de saisir la perche que vous aura tendu le jury, puis de dire, cahin-caha, un certain nombre de choses, si ensuite, à l’échelle de l’ensemble de l’épreuve, vous manifestez un certain nombre de qualités, vous pouvez éviter le désastre et même remonter la pente.

La logique de cette épreuve (le « hors-programme », l’improvisation) vous conduit à mettre en œuvre une logique de l’ « association d’idées », qui doit bien sûr toujours être contrôlée, argumentée, discutable au sens strict du terme, et qui vous permet d’exploiter le pouvoir de suggestion de l’image. A partir d’une publicité des années 60 pour la DS Citroën, on peut – on doit – bien sûr parler du pouvoir de fascination attaché à l’objet automobile et de ses conséquences effroyables (la « surconsommation » de voitures, donc la pollution, etc.) mais aussi faire un peu de sociologie (les différentes automobiles visent différents publics) ; le tableau de la nativité peut vous conduire à parler de la disparition de la peinture religieuse, ou à parler du traitement du corps dans les images qui nous sont contemporaines (pourquoi la Vierge, même lorsqu’elle est très belle, ne ressemble-t-elle pas à un mannequin ?), la photographie de la bourgade sibérienne peut vous amener à citer un film de SF représentant un univers détruit par une catastrophe industrielle ou écologique, ou bien à parler des projets de développement de la Sibérie aujourd’hui. A partir du cliché célèbrissime du « mano a mano » Anquetil – poulidor dans le Puy de Dôme (Tour de France 1964), on peut aussi bien parler (après avoir décrit méticuleusement la photo, qui s’y prête) du lien entre le sport spectacle et le dopage que des transformations, au cours de l’Histoire,  du motif narratif et épique du duel (d’Homère au Tour de France en passant par Les Trois Mousquetaires ou le western Spaghetti)

Certaines images vont vous permettre de manifester votre « regard d’ingénieur » : la  publicité pour la DS Citroën vous amènera à parler de design automobile[1] – mais il faudra aussi que vous soyez capable d’analyser l’imaginaire que mobilise cette publicité.

 

On peut dire que la lecture d’image est le premier temps de cette  épreuve qui s’infléchit ensuite (ou bifurque) vers un entretien. Mais dans l’idéal, l’épreuve suit un cours sinueux qui permet de ménager une continuité : le commentaire de l’image conduit le  jury à  poser des questions au candidat sur sa vision des choses, ses réactions, ses positions philosophiques, etc., et donc on glisse de la lecture d’images à l’entretien. Si le commentaire de l’image livré par le candidat ne permet pas ce mouvement, le jury peut indiquer que ce premier temps de l’épreuve est terminé et amorcer l’entretien en posant des  questions au candidat, ou bien lui demander de se présenter (et à partir de là démarre un entretien de personnalité « classique »).

 

 

 

 

 

[1] A propos de la DS et du design, voir sur mon blog, Guy Barthèlemy Littérature,  dans le fichier « Conseil élémentaire pour un entretien », le texte de Roland Barthes. 

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