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03/09/2017

Le saint-simonisme

Saint-simonisme.doc

                        LE SAINT-SIMONISME

 

[Mouvement d’hommes et d’idées qui a joué un rôle essentiel au XIXe, le saint-simonisme a été ensuite complètement oublié, y compris dans les livres d’histoire. Il a été redécouvert voici quelques décennies par les historiens, bien avant que notre actuel président de la République ne s’en réclame, ce qui ne manque pas d’intérêt mais est un peu ambigu, comme la notice ci-dessous permettra au lecteur de le comprendre. Si cette même notice est suceptible d’intéresser de futurs ingénieurs, c’est parce qu’elle montre l’importance que le Saint-simonisme, qui a beaucoup recruté parmi les polytechniciens, accordait à ce nouveau type humain et social, au moins autant que professionnel, caractéristique de la modernité du XIXe siècle. Il ya donc ici beaucoup à glaner pour tous ceux qui s’interrogent sur la place, effective ou rêvée, qui a été, ou qui peut être, celle de l’ingénieur dans le monde social, et on sait que les jurys questionnent volontiers les gentils candidats à ce propos… G.B.]

 

Le saint-simonisme est une idéologie reposant sur une doctrine socio-économique et politique dont l'influence fut déterminante au XIXe siècle. Elle tient son nom du comte de Saint-Simon (1760-1825). Ses disciples ou partisans sont qualifiés de « saint-simoniens ». Elle peut être considérée comme la pensée fondatrice de la société industrielle française.

Si l'on en croit les présupposés établis par Saint-Simon, il s'agirait d'en finir avec les révolutions des XVIIIe et XIXe siècles et les guerres, mais aussi les privilèges, les inégalités, les injustices, l'égoïsme, tout autant que l'intolérance, l'obscurantisme et bien sûr le féodalisme, en un mot ce à quoi il pense pouvoir résumer l'Ancien Régime. Il propose donc un changement de société et préconise une société fraternelle dont les membres les plus compétents (industriels, scientifiques, artistes, intellectuels, ingénieurs…) auraient pour tâche d'administrer la France d’une manière conforme à la rationalité économique, afin d'en faire un pays prospère, où règneraient l'esprit d'entreprise, l'intérêt général, la liberté, l'égalité et la paix.

Sous l'impulsion de l'un de ses principaux représentants, Barthélemy Prosper Enfantin, cette doctrine, au moment de son plus fort développement (vers 1830), prend la forme d'une société religieuse utopique.

 

Doctrine

Le comte de Saint-Simon est mobilisé par la recherche d'un principe universel capable de sous-tendre une philosophie conçue comme la science générale, c'est-à-dire la synthèse des sciences particulières. La gravitation universelle fera office de principe unique. Saint-Simon propose donc de remplacer l'idée abstraite de Dieu par la loi universelle de la gravitation, loi à laquelle Dieu aurait soumis l'univers. Newton l'a découverte, mais cinq « géants » en avaient précédemment posé les bases : Copernic, Kepler, Galilée, Huygens et Descartes.

Il affirme « qu'en y mettant les ménagements convenables, la philosophie de la gravitation peut remplacer successivement et sans secousse, par des idées plus claires et plus précises, tous les principes de morale utile que la théologie enseigne ». Dans la Lettre d'un habitant de Genève à ses contemporains (1803), il conçoit le projet de l'ouverture d'une souscription devant le tombeau de Newton, posant ainsi le fondement d'une sorte de « religion » de la science. On peut considérer que Saint-Simon est ainsi l'héritier, avec deux siècles de retard, de la théorie de l'héliocentrisme, et de la révolution copernicienne qui s'est développée aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Doctrine sociale

Sur le plan social, la société proposée par Saint-Simon est fondée sur le principe de l'égalité parfaite et sur l'association entre les Hommes. Les privilèges de la noblesse et de la royauté doivent être supprimés pour en finir avec la féodalité et parce que l'aristocratie vit aux dépens de la nation. Elle s'oppose à tout privilège et droit de naissance.

Chacun doit pouvoir grimper dans l'échelle sociale et arriver au premier rang en fonction de ses mérites, alors que dans la réalité sociale du XIXe siècle une immense majorité de travailleurs de toute nature est exploitée par une faible minorité d'oisifs (notamment les « propriétaires-rentiers »). Mais le travail de chacun  doit être utile à la société. Chacun doit obtenir la considération de la société, et doit obtenir des bénéfices, proportionnellement à sa capacité.

Mais si l’on veut parvenir à ces buts, l'industrie doit prendre le pas dans la société. Les industriels sont invités à former un parti et à prendre le pouvoir. Il faudra obenir non seulement l'union  de tous les producteurs, mais la collaboration des  savants, des  théologiens, des artistes, des légistes, et aussi des rentiers les plus capables, pour organiser le nouveau système social, qui devra être le plus avantageux pour l'industrie et les producteurs, utile à toute la société, et pragmatique, c'est-à-dire prendre en compte l'état actuel de la société.

Il faudra aussi encourager l'industrie, l'agriculture, le commerce et augmenter la production, faire de grands travaux, afin d'élever le niveau de vie des Français.

Doctrine spirituelle

Saint-Simon entend donner le pouvoir spirituel aux scientifiques, dont les industriels sont les garants. Une morale commune, fondement spirituel de la société, doit servir de guide pour que règne le bonheur entre les Hommes, et régir les individus aussi bien que la société, dans le but de rendre l'homme le plus heureux possible. Elle doit être basée sur la liberté de conscience et est déduite du principe « les Hommes doivent se regarder comme frères, s'associer et s'entraider ». Cette morale doit cependant être laïque et rationnelle, car elle est basée sur les intérêts palpables des Hommes, la quête du bonheur et de la fraternité.

Cette morale doit avoir pour but d'instaurer une organisation de la société qui pousse l'Homme à mettre le meilleur de lui-même au service des autres. Son principe général doit être de diriger la société vers l'amélioration physique, morale et intellectuelle des Hommes et d'établir une organisation sociale qui assure du travail à tout le monde, car « l'homme le plus heureux est celui qui travaille et la famille la plus heureuse est celle dont tous les membres emploient utilement leur temps ». Il conviendra d’ajouter une instruction rationnelle, et des jouissances propres à développer l'intelligence des prolétaires.

Cette morale  doit attirer l'attention de l'Homme sur les intérêts communs des membres de la société. La politique ne doit être que l'application de la morale et doit être motivée par le bon sens et l'amour du prochain, et non par la charité (au sens péjoratif qu’a pris ce mot au XIXe).

Doctrine politique

Saint-Simon veut que les industriels, les cultivateurs et les négociants les plus capables et les plus désintéressés, non pas dirigent, mais administrent la nation en conformité avec la rationalité économique, et conçoivent le budget de l’état comme celui d’une entreprise. Il souhaite que la société devienne un grand atelier où chaque classe a un rôle utile.

Pour lui, les industriels doivent s'associer avec leurs ouvriers. Cette association doit être basée sur les sentiments (sur l’empathie) et sur le sens moral, afin de transcender les intérêts particuliers au nom de l'intérêt général et du bien public. Les industriels doivent guider leurs égaux et associés, et leur direction fraternelle reposer sur l'affection, l'estime et la confiance.

La politique n'est que la science de la production et le peuple doit être associé à la politique, comme il l'est à la production.

Selon Pierre Musso, l'association entre les Hommes et les liens de fraternité que St-Simon  souhaite entre les hommes, contre l'individualisme et les intérêts particuliers, répondent à une analogie avec les réseaux physiques (ceux par exemple des canaux dans sa Picardie natale), d'où le nom de philosophie des réseaux.

Saint-Simon pense donc que l'État doit garantir la paix et ne doit assurer à l'industrie que sa sécurité, et au commerce que la liberté des échanges. Pour construire le nouvel édifice social, il préconise l'instauration d'un Parlement à trois niveaux :

  • une chambre d'inventeurs, ingénieurs, artistes ou architectes chargés d'élaborer un projet de développement économique et social et de promouvoir les projets du parlement, les bienfaits du travail, l'amélioration du sort du peuple et les idées de progrès ;
  • une chambre chargée de l'examen des projets de la chambre d'invention, composée de savants, qui doit proposer un nouveau programme d'instruction publique et des fêtes censées rappeler aux hommes leurs devoirs ;
  • une chambre chargée de l'exécution des projets et composée uniquement des plus importants industriels.

Enfin, tous les Français doivent élaborer un programme de défense nationale, afin de défendre la France en cas d'attaque militaire.

Saint-Simon rêve d'un âge industriel faisant suite à l'âge féodal, et d'une fédération groupant tous les gouvernements d'Europe.

Doctrine religieuse

Barthélémy-Prosper Enfantin, chef de la religion saint-simonienne

À la fin de sa vie, Saint-Simon jette les bases d'une nouvelle « religion », qu'il appelle « Nouveau Christianisme », afin de lutter contre l'égoïsme et l'individualisme.

Reprenant les principes moraux du christianisme, cette nouvelle religion, considérée plutôt comme un nouveau code moral, doit être philanthropique et devenir le fondement spirituel de la société : « aimez votre prochain comme vous-même » et « les Hommes doivent se regarder comme frères ». Elle doit également enseigner à l'Homme que pour obtenir la vie éternelle, il doit travailler à l'amélioration de l'existence de son semblable et défendre l'intérêt général au détriment de l'intérêt particulier. Elle a pour but déclaré « l'amélioration du sort moral, physique et intellectuel de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre ». Elle ne doit pas liguer les classes entre elles, mais encourager et honorer le travail. Elle proscrit le sang, la violence, l'iniquité et la ruse.

Son avènement liera les artistes, les savants et les industriels, les fera directeurs de l'espèce humaine, placera les beaux-arts, les sciences, l'industrie à la tête des connaissances sacrées. Enfin, elle annonce que le paradis sur terre est proche, car en se rendant maître de la Nature, les Hommes, par leur travail, satisferont leurs besoins matériels comme spirituels. Il s'ensuivra une société du bien-être, où règneront la liberté et la paix.

Bien qu’ils reprennent  les fondements de sa doctrine, les disciples de Saint-Simon en rejettent plusieurs points importants : alors qu’il déclare que la société industrielle doit être fondée sur l’association des compétences et être la plus égalitaire possible, l’école saint-simonienne pense que la société doit être hiérarchisée selon les mérites de chacun. En outre elle dénonce la propriété et l’héritage comme une forme d’exploitation de l’homme par l’homme, la remplace par le collectivisme et refuse le libre-échange. De la nouvelle morale de Saint-Simon, l’école fait un dogme avec son église, ses rites et sa hiérarchie.

Ses disciples mettent en pratique l'industrialisme de Saint-Simon :

  • développement économique : industrie, banques, transports ferroviaires et maritimes, assurances, exploitation des mines ;
  • engagement politique, scientifique, culturel.

Ils revendiquent l'égalité entre les hommes et les femmes, mais échouent à établir l'égalité entre les classes.

 

Les saint-simoniens sont à l'origine de grands travaux pendant la Révolution industrielle :

Ils participent aussi à des traités de libre-échange.

 

Les idées saint-simoniennes dans l'économie, dans leur version libérale, sont adoptées par Napoléon III, à travers son proche conseiller Michel Chevalier.

Les héritiers de Saint-Simon exercent ainsi une influence déterminante à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, d'abord en France : économistes, sociologues, industriels, hommes politiques, scientifiques, souvent polytechniciens.

Le saint-simonisme pratique

La pratique industrielle

Les chemins de fer avaient toujours préoccupé les saint-simoniens. Emile Pereire avait été à l’origine de la construction du Paris-Saint Germain (1835). Les divisions entre compagni

                        LE SAINT-SIMONISME

 

[Mouvement d’hommes et d’idées qui a joué un rôle essentiel au XIXe, le saint-simonisme a été ensuite complètement oublié, y compris dans les livres d’histoire. Il a été redécouvert voici quelques décennies par les historiens, bien avant que notre actuel président de la République ne s’en réclame, ce qui ne manque pas d’intérêt mais est un peu ambigu, comme la notice ci-dessous permettra au lecteur de le comprendre. Si cette même notice est suceptible d’intéresser de futurs ingénieurs, c’est parce qu’elle montre l’importance que le Saint-simonisme, qui a beaucoup recruté parmi les polytechniciens, accordait à ce nouveau type humain et social, au moins autant que professionnel, caractéristique de la modernité du XIXe siècle. Il ya donc ici beaucoup à glaner pour tous ceux qui s’interrogent sur la place, effective ou rêvée, qui a été, ou qui peut être, celle de l’ingénieur dans le monde social, et on sait que les jurys questionnent volontiers les gentils candidats à ce propos… G.B.]

 

Le saint-simonisme est une idéologie reposant sur une doctrine socio-économique et politique dont l'influence fut déterminante au XIXe siècle. Elle tient son nom du comte de Saint-Simon (1760-1825). Ses disciples ou partisans sont qualifiés de « saint-simoniens ». Elle peut être considérée comme la pensée fondatrice de la société industrielle française.

Si l'on en croit les présupposés établis par Saint-Simon, il s'agirait d'en finir avec les révolutions des XVIIIe et XIXe siècles et les guerres, mais aussi les privilèges, les inégalités, les injustices, l'égoïsme, tout autant que l'intolérance, l'obscurantisme et bien sûr le féodalisme, en un mot ce à quoi il pense pouvoir résumer l'Ancien Régime. Il propose donc un changement de société et préconise une société fraternelle dont les membres les plus compétents (industriels, scientifiques, artistes, intellectuels, ingénieurs…) auraient pour tâche d'administrer la France d’une manière conforme à la rationalité économique, afin d'en faire un pays prospère, où règneraient l'esprit d'entreprise, l'intérêt général, la liberté, l'égalité et la paix.

Sous l'impulsion de l'un de ses principaux représentants, Barthélemy Prosper Enfantin, cette doctrine, au moment de son plus fort développement (vers 1830), prend la forme d'une société religieuse utopique.

 

Doctrine

Le comte de Saint-Simon est mobilisé par la recherche d'un principe universel capable de sous-tendre une philosophie conçue comme la science générale, c'est-à-dire la synthèse des sciences particulières. La gravitation universelle fera office de principe unique. Saint-Simon propose donc de remplacer l'idée abstraite de Dieu par la loi universelle de la gravitation, loi à laquelle Dieu aurait soumis l'univers. Newton l'a découverte, mais cinq « géants » en avaient précédemment posé les bases : Copernic, Kepler, Galilée, Huygens et Descartes.

Il affirme « qu'en y mettant les ménagements convenables, la philosophie de la gravitation peut remplacer successivement et sans secousse, par des idées plus claires et plus précises, tous les principes de morale utile que la théologie enseigne ». Dans la Lettre d'un habitant de Genève à ses contemporains (1803), il conçoit le projet de l'ouverture d'une souscription devant le tombeau de Newton, posant ainsi le fondement d'une sorte de « religion » de la science. On peut considérer que Saint-Simon est ainsi l'héritier, avec deux siècles de retard, de la théorie de l'héliocentrisme, et de la révolution copernicienne qui s'est développée aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Doctrine sociale

Sur le plan social, la société proposée par Saint-Simon est fondée sur le principe de l'égalité parfaite et sur l'association entre les Hommes. Les privilèges de la noblesse et de la royauté doivent être supprimés pour en finir avec la féodalité et parce que l'aristocratie vit aux dépens de la nation. Elle s'oppose à tout privilège et droit de naissance.

Chacun doit pouvoir grimper dans l'échelle sociale et arriver au premier rang en fonction de ses mérites, alors que dans la réalité sociale du XIXe siècle une immense majorité de travailleurs de toute nature est exploitée par une faible minorité d'oisifs (notamment les « propriétaires-rentiers »). Mais le travail de chacun  doit être utile à la société. Chacun doit obtenir la considération de la société, et doit obtenir des bénéfices, proportionnellement à sa capacité.

Mais si l’on veut parvenir à ces buts, l'industrie doit prendre le pas dans la société. Les industriels sont invités à former un parti et à prendre le pouvoir. Il faudra obenir non seulement l'union  de tous les producteurs, mais la collaboration des  savants, des  théologiens, des artistes, des légistes, et aussi des rentiers les plus capables, pour organiser le nouveau système social, qui devra être le plus avantageux pour l'industrie et les producteurs, utile à toute la société, et pragmatique, c'est-à-dire prendre en compte l'état actuel de la société.

Il faudra aussi encourager l'industrie, l'agriculture, le commerce et augmenter la production, faire de grands travaux, afin d'élever le niveau de vie des Français.

Doctrine spirituelle

Saint-Simon entend donner le pouvoir spirituel aux scientifiques, dont les industriels sont les garants. Une morale commune, fondement spirituel de la société, doit servir de guide pour que règne le bonheur entre les Hommes, et régir les individus aussi bien que la société, dans le but de rendre l'homme le plus heureux possible. Elle doit être basée sur la liberté de conscience et est déduite du principe « les Hommes doivent se regarder comme frères, s'associer et s'entraider ». Cette morale doit cependant être laïque et rationnelle, car elle est basée sur les intérêts palpables des Hommes, la quête du bonheur et de la fraternité.

Cette morale doit avoir pour but d'instaurer une organisation de la société qui pousse l'Homme à mettre le meilleur de lui-même au service des autres. Son principe général doit être de diriger la société vers l'amélioration physique, morale et intellectuelle des Hommes et d'établir une organisation sociale qui assure du travail à tout le monde, car « l'homme le plus heureux est celui qui travaille et la famille la plus heureuse est celle dont tous les membres emploient utilement leur temps ». Il conviendra d’ajouter une instruction rationnelle, et des jouissances propres à développer l'intelligence des prolétaires.

Cette morale  doit attirer l'attention de l'Homme sur les intérêts communs des membres de la société. La politique ne doit être que l'application de la morale et doit être motivée par le bon sens et l'amour du prochain, et non par la charité (au sens péjoratif qu’a pris ce mot au XIXe).

Doctrine politique

Saint-Simon veut que les industriels, les cultivateurs et les négociants les plus capables et les plus désintéressés, non pas dirigent, mais administrent la nation en conformité avec la rationalité économique, et conçoivent le budget de l’état comme celui d’une entreprise. Il souhaite que la société devienne un grand atelier où chaque classe a un rôle utile.

Pour lui, les industriels doivent s'associer avec leurs ouvriers. Cette association doit être basée sur les sentiments (sur l’empathie) et sur le sens moral, afin de transcender les intérêts particuliers au nom de l'intérêt général et du bien public. Les industriels doivent guider leurs égaux et associés, et leur direction fraternelle reposer sur l'affection, l'estime et la confiance.

La politique n'est que la science de la production et le peuple doit être associé à la politique, comme il l'est à la production.

Selon Pierre Musso, l'association entre les Hommes et les liens de fraternité que St-Simon  souhaite entre les hommes, contre l'individualisme et les intérêts particuliers, répondent à une analogie avec les réseaux physiques (ceux par exemple des canaux dans sa Picardie natale), d'où le nom de philosophie des réseaux.

Saint-Simon pense donc que l'État doit garantir la paix et ne doit assurer à l'industrie que sa sécurité, et au commerce que la liberté des échanges. Pour construire le nouvel édifice social, il préconise l'instauration d'un Parlement à trois niveaux :

  • une chambre d'inventeurs, ingénieurs, artistes ou architectes chargés d'élaborer un projet de développement économique et social et de promouvoir les projets du parlement, les bienfaits du travail, l'amélioration du sort du peuple et les idées de progrès ;
  • une chambre chargée de l'examen des projets de la chambre d'invention, composée de savants, qui doit proposer un nouveau programme d'instruction publique et des fêtes censées rappeler aux hommes leurs devoirs ;
  • une chambre chargée de l'exécution des projets et composée uniquement des plus importants industriels.

Enfin, tous les Français doivent élaborer un programme de défense nationale, afin de défendre la France en cas d'attaque militaire.

Saint-Simon rêve d'un âge industriel faisant suite à l'âge féodal, et d'une fédération groupant tous les gouvernements d'Europe.

Doctrine religieuse

Barthélémy-Prosper Enfantin, chef de la religion saint-simonienne

À la fin de sa vie, Saint-Simon jette les bases d'une nouvelle « religion », qu'il appelle « Nouveau Christianisme », afin de lutter contre l'égoïsme et l'individualisme.

Reprenant les principes moraux du christianisme, cette nouvelle religion, considérée plutôt comme un nouveau code moral, doit être philanthropique et devenir le fondement spirituel de la société : « aimez votre prochain comme vous-même » et « les Hommes doivent se regarder comme frères ». Elle doit également enseigner à l'Homme que pour obtenir la vie éternelle, il doit travailler à l'amélioration de l'existence de son semblable et défendre l'intérêt général au détriment de l'intérêt particulier. Elle a pour but déclaré « l'amélioration du sort moral, physique et intellectuel de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre ». Elle ne doit pas liguer les classes entre elles, mais encourager et honorer le travail. Elle proscrit le sang, la violence, l'iniquité et la ruse.

Son avènement liera les artistes, les savants et les industriels, les fera directeurs de l'espèce humaine, placera les beaux-arts, les sciences, l'industrie à la tête des connaissances sacrées. Enfin, elle annonce que le paradis sur terre est proche, car en se rendant maître de la Nature, les Hommes, par leur travail, satisferont leurs besoins matériels comme spirituels. Il s'ensuivra une société du bien-être, où règneront la liberté et la paix.

Bien qu’ils reprennent  les fondements de sa doctrine, les disciples de Saint-Simon en rejettent plusieurs points importants : alors qu’il déclare que la société industrielle doit être fondée sur l’association des compétences et être la plus égalitaire possible, l’école saint-simonienne pense que la société doit être hiérarchisée selon les mérites de chacun. En outre elle dénonce la propriété et l’héritage comme une forme d’exploitation de l’homme par l’homme, la remplace par le collectivisme et refuse le libre-échange. De la nouvelle morale de Saint-Simon, l’école fait un dogme avec son église, ses rites et sa hiérarchie.

Ses disciples mettent en pratique l'industrialisme de Saint-Simon :

  • développement économique : industrie, banques, transports ferroviaires et maritimes, assurances, exploitation des mines ;
  • engagement politique, scientifique, culturel.

Ils revendiquent l'égalité entre les hommes et les femmes, mais échouent à établir l'égalité entre les classes.

 

Les saint-simoniens sont à l'origine de grands travaux pendant la Révolution industrielle :

Ils participent aussi à des traités de libre-échange.

 

Les idées saint-simoniennes dans l'économie, dans leur version libérale, sont adoptées par Napoléon III, à travers son proche conseiller Michel Chevalier.

Les héritiers de Saint-Simon exercent ainsi une influence déterminante à partir de la deuxième moitié du XIXe siècle, d'abord en France : économistes, sociologues, industriels, hommes politiques, scientifiques, souvent polytechniciens.

Le saint-simonisme pratique

La pratique industrielle

Les chemins de fer avaient toujours préoccupé les saint-simoniens. Emile Pereire avait été à l’origine de la construction du Paris-Saint Germain (1835). Les divisions entre compagnies étaient à l’origine du retard de la France : Enfantin, le grand prédicateur de l’association est nommé administrateur de 3 compagnies (Paris-Lyon, Lyon-Avignon, Avignon-Marseille) et secrétaire général du Paris-Lyon (1846) mais la crise de 1847 et la révolution compromettent la fusion qui n’aura lieu qu’en 1852.

Le canal de Suez revient dans les préoccupations d’Enfantin, pour qui il figure le travail industriel utile et grandiose. Il voulait prouver que le rêveur était un homme d’action. Ce serait le témoignage éclatant de la contribution du saint-simonisme au progrès de  l’humanité. Enfantin constitue donc une Société d’études pour le canal de Suez (1846) avec le fidèle Arlès-Dufour, des ingénieurs allemands, autrichiens et des britanniques (Stephenson, Starbuck). Les frères Talabot étaient adjoints comme ingénieurs. Le siège social était au domicile d’Enfantin, 34 rue de la Victoire, le fonds social de 150 000 francs.

A la première réunion, Enfantin déclare : Nous avons conscience d’avoir préparé cette grande œuvre comme jamais œuvre industrielle n’a été préparée ; il nous reste à l’accomplir avec vous comme jamais grande entreprise industrielle n’a été faite, c’est-à-dire sans rivalités nationales, avec le concours de 3 grands peuples que la politique a souvent divisés... il nous reste à tracer sur le monde le signe de la paix, et, à vrai dire, le trait d’union entre les parties du vieux monde, l’Orient et l’Occident. Il disait aussi: Ce n’est plus une théorie, c’est une affaire.

Suez et les derniers actes du saint-simonisme

L’affaire de Suez semblait enterrée avec le retrait des Anglais mais Ferdinand de Lesseps renoue connaissance avec Enfantin et Arlès en 1854 : Saïd-Pacha l’appelle en Égypte et il obtient dès le 5 novembre le firman qui lui donne concession du canal. Cependant, en 1855 Lesseps rompt avec Enfantin et Arlès ; il estime que la Compagnie universelle du Canal de Suez ne doit rien à la Société d’Études fondée par les saints-simoniens. Ainsi l’œuvre saint-simonienne échappe aux fils de Saint-Simon. Amer et déçu, Enfantin ne se donne pas le ridicule d’une protestation publique. Plus tard, il dira : « J’ai été un vieux fou de m’affliger... Il importe peu que le vieux Prosper Enfantin ait subi une déception ; il importe peu que ses enfants aient été trompés dans leur espoir, mais il importe que le canal soit percé et il le sera. Et c’est pourquoi je remercie Lesseps et le bénis ».

Entretemps Enfantin avait été nommé au conseil d’administration du PLM et délégué à Lyon (1852). Il fonde à Lyon plusieurs sociétés : Société des rails omnibus, Société d’éclairage au gaz et Compagnie générale des eaux (1853-1856). D’anciens saint-simoniens fondent le Crédit Mobilier, la Compagnie Maritime et la Compagnie immobilière. Leur influence est considérable : Michel Chevalier prépare le traité de libre-échange avec l’Angleterre de 1860, Isaac et Emile Pereire, célèbres banquiers, sont écoutés de Napoléon III. Enfantin publie La Science de l’homme (1858) qui rassemble les idées de la doctrine et reprend un ouvrage de Saint-Simon portant le même titre.

 

 

 

 

es étaient à l’origine du retard de la France : Enfantin, le grand prédicateur de l’association est nommé administrateur de 3 compagnies (Paris-Lyon, Lyon-Avignon, Avignon-Marseille) et secrétaire général du Paris-Lyon (1846) mais la crise de 1847 et la révolution compromettent la fusion qui n’aura lieu qu’en 1852.

Le canal de Suez revient dans les préoccupations d’Enfantin, pour qui il figure le travail industriel utile et grandiose. Il voulait prouver que le rêveur était un homme d’action. Ce serait le témoignage éclatant de la contribution du saint-simonisme au progrès de  l’humanité. Enfantin constitue donc une Société d’études pour le canal de Suez (1846) avec le fidèle Arlès-Dufour, des ingénieurs allemands, autrichiens et des britanniques (Stephenson, Starbuck). Les frères Talabot étaient adjoints comme ingénieurs. Le siège social était au domicile d’Enfantin, 34 rue de la Victoire, le fonds social de 150 000 francs.

A la première réunion, Enfantin déclare : Nous avons conscience d’avoir préparé cette grande œuvre comme jamais œuvre industrielle n’a été préparée ; il nous reste à l’accomplir avec vous comme jamais grande entreprise industrielle n’a été faite, c’est-à-dire sans rivalités nationales, avec le concours de 3 grands peuples que la politique a souvent divisés... il nous reste à tracer sur le monde le signe de la paix, et, à vrai dire, le trait d’union entre les parties du vieux monde, l’Orient et l’Occident. Il disait aussi: Ce n’est plus une théorie, c’est une affaire.

Suez et les derniers actes du saint-simonisme

L’affaire de Suez semblait enterrée avec le retrait des Anglais mais Ferdinand de Lesseps renoue connaissance avec Enfantin et Arlès en 1854 : Saïd-Pacha l’appelle en Égypte et il obtient dès le 5 novembre le firman qui lui donne concession du canal. Cependant, en 1855 Lesseps rompt avec Enfantin et Arlès ; il estime que la Compagnie universelle du Canal de Suez ne doit rien à la Société d’Études fondée par les saints-simoniens. Ainsi l’œuvre saint-simonienne échappe aux fils de Saint-Simon. Amer et déçu, Enfantin ne se donne pas le ridicule d’une protestation publique. Plus tard, il dira : « J’ai été un vieux fou de m’affliger... Il importe peu que le vieux Prosper Enfantin ait subi une déception ; il importe peu que ses enfants aient été trompés dans leur espoir, mais il importe que le canal soit percé et il le sera. Et c’est pourquoi je remercie Lesseps et le bénis ».

Entretemps Enfantin avait été nommé au conseil d’administration du PLM et délégué à Lyon (1852). Il fonde à Lyon plusieurs sociétés : Société des rails omnibus, Société d’éclairage au gaz et Compagnie générale des eaux (1853-1856). D’anciens saint-simoniens fondent le Crédit Mobilier, la Compagnie Maritime et la Compagnie immobilière. Leur influence est considérable : Michel Chevalier prépare le traité de libre-échange avec l’Angleterre de 1860, Isaac et Emile Pereire, célèbres banquiers, sont écoutés de Napoléon III. Enfantin publie La Science de l’homme (1858) qui rassemble les idées de la doctrine et reprend un ouvrage de Saint-Simon portant le même titre.

 

 

 

 

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